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    Solitude... Pour vous cela veut dire seul,
    Pour moi - qui saura me comprendre ?
    Cela veut dire : vert, vert dru, vivace tendre,
    Vert platane, vert calycanthe, vert tilleul.

    Mot vert. Silence vert. Mains vertes
    De grands arbres penchés, d'arbustes fous ;
    Doigts mêlés de rosiers, de lauriers, de bambous,
    Pieds de cèdres âgés où se concertent
    Les bêtes à Bon Dieu ; rondes alertes
    De libellules sur l'eau verte...

    Dans l'eau, reflets de marronniers,
    D'ifs bruns, de vimes blonds, de longues menthes
    Et de jeune cresson ; flaques dormantes
    Et courants vifs où rament les " meuniers " ;
    Rainettes à ressort et carpes vénérables ;
    Martin-pêcheur... En mars, étoiles de pruniers,
    De poiriers, de pommiers ; grappes d'érables.
    En mai, la fête des ciguës,
    Celle des boutons d'or : splendeur des prés.
    Clochers blancs des yuccas, lances aiguës
    Et tiges douces, chèvrefeuille aux brins serrés,
    Vigne-vierge aux bras lourds chargés de palmes,
    Et toujours, et partout, fraîche, luisante, calme,
    L'invasion du lierre à petits flots lustrés
    Gagnant le mur des cours, les carreaux des fenêtres,
    Les toits des pavillons vainement retondus...
    Lierre nouant au front du chêne, au cou du hêtre,
    Ses bouquets de grains noirs comme un piège tendu
    A la grive hésitante ; vert royaume
    Des merles en habit - royaume qui s'étend
    Ainsi que dans un parc de Florence ou de Rome
    En nappes d'émeraude et cordages flottants...
    Lierre de cette allée au porche de lumière
    Dont les platanes séculaires, chaque été,
    Font une longue cathédrale verte - lierre
    De la grotte en rocaille où dorment abrités
    Chaque hiver, les callas et les cactus fragiles ;
    Housse, que la poussière blanche de la ville
    Givre à peine les soirs de très grand vent - pour moi,
    Vert obligé des vieilles pierres,
    Des arbres vieux, des toits qui penchent, des vieux toits -

    Un château ? Non, Madame, une gentilhommière,
    Un ermitage vert qui sent les bois, le foin,
    Où les bruits dé la route arrivent d'assez loin
    Pour n'être plus qu'une musique en demi-teintes.
    Un train sur le talus se hâte avec des plaintes,
    Mais l'horizon tout rose et mauve qu'il rejoint
    Transpose le voyage en couleurs de légende.
    On regarde un instant vers ces trains qui s'en vont
    Traînant leur barbe grise - et c'est vrai qu'ils répandent
    Un peu de nostalgie au fil de l'été blond...

    Mais le jazz des moineaux fait rage dans les feuilles,
    Les pigeons blancs s'exaltent, le cyprès
    Est la tour enchantée où des notes s'effeuillent
    Autour du rossignol. Du pré,
    Monte la fièvre des grillons, des sauterelles,
    Toutes les herbes ont des pattes, ont des ailes -
    Et l'Ane et le Cheval de la Fable sont là
    Et Chantecler se joue en grand gala
    Jour et nuit dans la cour où des plumes voltigent.

    Au clair de l'eau, c'est l'éternel prodige
    Du têtard de velours devenu crapaud d'or,
    De la voix de cristal parmi les râpes neuves
    D'innombrables grenouilles. Le chat dort.
    Dickette-chien s'affaire - et sur leur tête pleuvent
    Des pastilles de lune ou de soleil brûlant.
    S'il pleut vraiment, la pluie à pleins seaux ruisselants
    S'éparpille de même aux doigts verts qui l'arrêtent.

    Un tilleul, des bambous. L'abri vert du poète,
    Du vert, comprenez-vous ? Pour qu'aux vieilles maisons
    Rien ne blesse les yeux sous leurs paupières lasses.
    Douceur de l'arbre, de la mousse, du gazon...
    Vous dites : Solitude ? Ah ! dans l'heure qui passe,
    Est-il rien de vivant plus vivant qu'un jardin,
    De plus mystérieux, parfumé, dru, tenace,
    Et peuplé - si peuplé qu'il arrive soudain
    Qu'on y discourt avec mille petits génies
    Sortis l'on ne sait d'où, comme chez Aladin.

    Un mot vert... Qui dira la fraîcheur infinie
    D'un mot couleur de sève et de source et de l'air
    Qui baigne une maison depuis toujours la vôtre,
    Un mot désert peut-être et desséché pour d'autres,
    Mais pour soi, familier, si proche, tendre, vert
    Comme un îlot, un cher îlot dans l'univers ?...
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    Quand nous en serons au temps des cerises
    Et gai rossignol et merle moqueur
    Seront tous en fête
    Les belles auront la folie en tête
    Et les amoureux du soleil au cœur
    Quand nous chanterons le temps des cerises
    Sifflera bien mieux le merle moqueur

    Mais il est bien court le temps des cerises
    Où l'on s'en va deux cueillir en rêvant
    Des pendants d'oreilles
    Cerises d'amour aux robes pareilles
    Tombant sous la feuille en gouttes de sang
    Mais il est bien court le temps des cerises
    Pendants de corail qu'on cueille en rêvant

    Quand vous en serez au temps des cerises
    Si vous avez peur des chagrins d'amour
    Evitez les belles
    Moi qui ne crains pas les peines cruelles
    Je ne vivrai pas sans souffrir un jour
    Quand vous en serez au temps des cerises
    Vous aurez aussi des chagrins d'amour

    J'aimerai toujours le temps des cerises
    C'est de ce temps-là que je garde au cœur
    Une plaie ouverte
    Et Dame Fortune, en m'étant offerte
    Ne saura jamais calmer ma douleur
    J'aimerai toujours le temps des cerises
    Et le souvenir que je garde au cœur

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    - L'ange reste près d'elle ; il sourit à ses pleurs,
    Et resserre les nœuds de ses chaînes de fleurs ;
    Arrachant une plume à son aile azurée,
    Il la met dans la main qui s'était retirée.
    En vain, elle résiste, il triomphe... il sourit...
    Laissant couler ses pleurs, la jeune femme écrit.

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    Si les ondines et les fées
    Maintenant ainsi qu'autrefois
    Sur une coquille de noix
    Naviguaient, de corail coiffées,

    Et si j'étais, - car nous aimons
    Suivre parfois d'étranges rêves, -
    Un des minuscules démons
    Rois de la mer bleue et des grèves,

    Je ne voudrais d'autre travail
    Que d'agiter cet éventail
    Pour faire une brise légère

    Qui pousserait tout doucement
    Le bateau vers un port charmant
    Et vous seriez la passagère.

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    L'homme insulté‚ qui se retient
    Est, à coup sûr, doux et patient.
    Par contre, l'homme à l'humeur aigre
    Gifle celui qui le dénigre.
    Moi, je n'agis qu'à bon escient :
    Mais, gare aux fâcheux qui me scient !
    Qu'ils soient de Château-l'Abbaye
    Ou nés à Saint-Germain-en-Laye,
    Je les rejoins d'où qu'ils émanent,
    Car mon courroux est permanent.
    Ces gens qui se croient des Shakespeares
    Ou rois des îles Baléares !
    Qui, tels des condors, se soulèvent !
    Mieux vaut le moindre engoulevent.
    Par le diable, sans être un aigle,
    Je vois clair et ne suis pas bigle.
    Fi des idiots qui balbutient !
    Gloire au savant qui m'entretient !

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