• Isabelle Balot

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    Sous le soleil brûlant de l'éternelle Afrique
    Il est un fauve-roi au manteau de lumière
    Qui promène en son flanc une ardeur meurtrière
    Tapi dans le désert ou au fond d'une crique.

    Sous les feux de midi lorsque tout semble mort
    Lors même que tout dort dans la chaleur safrane
    Ce guerrier guette encore au cœur de la savane
    Avec une lueur dans sa pupille d'or.

    Soudain le fauve clair en un saut fantastique
    S'élance dans les airs et bondit sur sa proie
    D'une pulsion mortelle il l'abat et la broie
    La tue en un éclair, par sa force magique.

    Moi je sais d'autres rois sous le ciel africain
    A qui l'on a volé l'espoir et le royaume
    Des guerriers trop menus, sans armure et sans heaume
    Déguenillés, pieds nus, à peau de maroquin.

    Nomades sans merci, au détour d'un chemin
    - Car le sort est inscrit au fond de leurs yeux sombres
    Comme dans une crypte où flotteraient des ombres
    Ils vont semer la mort, la grenade à la main.

    Voilà l'enfant-soldat, l'enfant qu'on assassine
    En bataillons épars sous le soleil brûlant
    Pour le diamant, l'ivoire, et l'or noir et l'or blanc!
    Un crayon dans la main, c'est la mort qu'il dessine.

    Et sous son front têtu casqué de boucles noires
    Les souvenirs venus du temps de l'innocence
    - Ce baume répandu du flacon de l'enfance -
    Sont un fil si ténu qu'il en perd la mémoire.

    Au milieu des combats, rien et nul ne l'arrête
    Plus tout-à-fait enfant, pas tout-à-fait un homme
    Il est dieu, il est roi, déjà adulte en somme
    Et se croit immortel, du meurtre plein la tête.

    A la fin des combats, assis dedans la cendre,
    De son fusil poisseux de sueur ou de sang
    Il torture un grillon teinté d'or et d'argent,
    Ecrase un scarabée ou une salamandre.

    Que voit-il renversé sur un sac de cartouches
    Dans ses yeux grand ouverts, le guerrier endormi
    Qu'entend-il quand il meurt sous le feu ennemi,
    Dans le tir des mortiers et sous le vol des mouches?

    Drogué, intoxiqué, écrasé de soleil
    Rêve-t'il d'un lagon et d'une source claire,
    Reçoit-il sur son front le baiser de sa mère
    A quoi peut-il rêver dans son dernier sommeil?

    Pardonnez-moi, Seigneur, quand l'Afrique meurtrie
    Pense à panser sa plaie et que renaît l'espoir
    D'une éternelle paix sur le continent noir
    Quand brillent les autels à l'heure où l'on Vous prie,

    Quand on promet la paix, et la paix l'on célèbre,
    Dans les constellations brillant au firmament
    Je crois voir malgré moi un lion de diamant
    Aux yeux de dieu païen riant dans les ténèbres.

    COPYRIGHT©Isabelle Balot 2005

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