• Ondine Valmore

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    Vois ce fruit, chaque jour plus tiède et plus vermeil,
    Se gonfler doucement aux regards du soleil !
    Sa sève, à chaque instant plus riche et plus féconde,
    L'emplit, on le dirait, de volupté profonde.

    Sous les feux d'un soleil invisible et puissant,
    Notre cœur est semblable à ce fruit mûrissant.
    De sucs plus abondants chaque jour il enivre,
    Et, maintenant mûri, il est heureux de vivre.

    L'automne vient : le fruit se vide et va tomber,
    Mais sa gaine est vivante et demande à germer.
    L'âge arrive, le cœur se referme en silence,
    Mais, pour l'été promis, il garde sa semence.

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    La neige au loin couvre la terre nue ;
    Les bois déserts étendent vers la nue
    Leurs grands rameaux qui, noirs et séparés,
    D'aucune feuille encor ne sont parés ;
    La sève dort et le bourgeon sans force
    Est pour longtemps engourdi sous l'écorce ;
    L'ouragan souffle en proclamant l'hiver
    Qui vient glacer l'horizon découvert.
    Mais j'ai frémi sous d'invisibles flammes
    Voix du printemps qui remuez les âmes,
    Quand tout est froid et mort autour de nous,
    Voix du printemps, ô voix, d'où venez-vous ?...

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    Adieu mes jours enfants, paradis éphémère !
    Fleur que brûle déjà le regard du soleil,
    Source dormeuse où rit une douce chimère,
    Adieu ! L'aurore fuit. C'est l'instant du réveil !

    J'ai cherché vainement à retenir tes ailes
    Sur mon cœur qui battait, disant : " Voici le jour ! "
    J'ai cherché vainement parmi mes jeux fidèles
    A prolonger mon sort dans ton calme séjour ;

    L'heure est sonnée, adieu mon printemps, fleur sauvage ;
    Demain tant de bonheur sera le souvenir.
    Adieu ! Voici l'été ; je redoute l'orage ;
    Midi porte l'éclair, et midi va venir.

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