• Max Elskamp

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    Et de vaisseaux, et de vaisseaux,
    Et de voiles, et tant de voiles,
    Mes pauvres yeux allez en eaux,
    Il en est plus qu'il n'est d'étoiles ;

    Et cependant je sais, j'en sais
    Tant d'étoiles et que j'ai vues
    Au-dessus des toits de mes rues,
    Et que j'ai sues et que je sais ;

    Mais des vaisseaux il en est plus,
    - Et j'en sais tant qui sont partis -
    Mais c'est mon testament ici,
    Que de vaisseaux il en est plus ;

    Et des vaisseaux voici les beaux
    Sur la mer, en robes de femmes,
    Allés suivant les oriflammes
    Au bout du ciel sombré dans l'eau,

    Et de vaisseaux tant sur les eaux
    La mer semble un pays en toile,
    Mes pauvres yeux allez en eaux,
    Il en est plus qu'il n'est d'étoiles.

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    Mais maintenant vient une femme,
    Et lors voici qu'on va aimer,
    Mais maintenant vient une femme
    Et lors voici qu'on va pleurer,

    Et puis qu'on va tout lui donner
    De sa maison et de son âme,
    Et puis qu'on va tout lui donner
    Et lors après qu'on va pleurer

    Car à présent vient une femme,
    Avec ses lèvres pour aimer,
    Car à présent vient une femme
    Avec sa chair tout en beauté,

    Et des robes pour la montrer
    Sur des balcons, sur des terrasses,
    Et des robes pour la montrer
    A ceux qui vont, à ceux qui passent,

    Car maintenant vient une femme
    Suivant sa vie pour des baisers,
    Car maintenant vient une femme,
    Pour s'y complaire et s'en aller.

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    Et voile à nul souffle bercée,
    S'enguidonne d'un beau ciel d'or
    Le dimanche très en décor
    Pour les femmes de mes pensées :

    Et les femmes ont dépensé
    Leur cœur tout devant les fenêtres
    Et creusent, d'amour enlisées,
    Jusqu'au pleur ce ciel des fenêtres.

    Vierges d'attente et de martyre,
    Au gril vert des persiennes lasses,
    Dans les jardins des croisées basses,
    Les femmes, jusqu'à se mourir,

    Cristallisent rouge aux fenêtres
    - Appeau naïvement enfant -
    Leur cœur sous les tabliers blancs
    Et tels des rideaux aux fenêtres.

    Or, en vain, les femmes, amantes
    D'aimer, se sentent infinies,
    Leurs besognes sont définies,
    Et, pauvre, leur cœur de servantes

    Froidit, pour que se fassent blanches
    Leurs mains, en très naïves grèves,
    Dans la comédie bleue du rêve.
    Or passent ainsi les dimanches.

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